mercredi 20 mars 2019

Grüne Woche - Semaine Verte de Berlin

Sur proposition de notre trésorier, voici un article en date du 22 janvier 2019, signé de Nathaleen Hewitt et Philippe Jachnik, qui rapporte ce qu'il convient de retenir du symposium de la Grüne Woche, la Semaine Verte, de Berlin.


                                                                               


L’EDITION 2019 DE LA SEMAINE VERTE 

(18-27.01.2019)

ET LES LAITIERS…


Créée en 1926, il y a 93 ans, la Semaine Verte de Berlin en est à sa 84ème édition, années de guerre obligent. Cette édition 2019 (dont l’Invité d’Honneur fut la Finlande) était parrainée, comme déjà l’an passé, non seulement par les Ministères fédéraux de l’Alimentation et de l’Agriculture d’une part, de l’Environnement d’autre part mais également par un troisième, celui du Développement et de la Coopération Economique. Le développement des pays pauvres et émergents et, partant, la « fixation sur place des populations pouvant avoir vocation aux migrations sauvages et risquées », ce qui passe par le développement de l’agriculture et la structuration de la ruralité, reste un thème récurrent de premier plan en Allemagne.

  
Les impressionnantes manifestations de masse dans les rues de Berlin (35.000 participants selon les organisateurs, 15.000 selon la police) le samedi 19 pour « une autre agriculture et une autre alimentation », pour « une autre politique agricole » font, depuis des années, partie du paysage. 2019 a bien été à la hauteur de cette tradition avec, le samedi, en plus des dizaines de milliers de manifestants, près de 150 tracteurs et poids lourds venus de toute l’Allemagne pour dénoncer l’agriculture industrielle productiviste et le manque d’ambition de la Ministre fédérale de l’Alimentation et de l’Agriculture, Julia Klöckner (CDU, proche de la Chancelière Merkel), en poste depuis mars dernier, tant en matière de bien-être animal que de redéfinition de la PAC et de ses postes de dépenses (là le message est qu’actuellement 70% des dépenses agricoles européennes sont « contre-productives » compte tenu de comment il faut les utiliser).

Des nombreux discours de Responsables agricoles et d’ONG consuméristes on retiendra avant tout que ces multiples structures ont en commun une vision de l’avenir faite d’exploitations agricoles diversifiées et non pas d’un quasi-monopole de quelques structures dites agro-industrielles.

Cette méga-manifestation avait, là aussi comme lors des éditions précédentes, été précédée, durant trois jours, à partir du mercredi, de nombreux Ateliers, Conférences de Presse, Rencontres (dont une entre les Dirigeants du DBV et ceux du MIV sur le thème Stratégie Laitière 2030 & Interprofession) ainsi que du célèbre et international GFFA ( Global Forum for Food and Agriculture) dont Julia KLöckner dit que c’est « Le Davos de l’Agriculture ». Plus de 70 Ministres de l’Agriculture y ont participé ainsi que, pour l’Allemagne Angela Merkel et Julia Klöckner et pour la Commission UE Phil Hogan et Vytenis Andriukaitis (Santé), ce dernier sur le très discuté thème du bien-être animal. Il a, au passage, expliqué qu’il est devenu important et urgent de mettre en place un partenariat santé animale avec les Autorités du Belarus, de la Moldavie, de la Russie et de l’Ukraine.

Concernant le projet des Autorités allemandes d’étiquetage du bien-être animal il a insisté sur le fait que, dans ce domaine aussi, des initiatives de tel ou tel Etat-membre ne peuvent avoir pour conséquence de battre en brèche la libre-circulation des marchandises au sein de l’UE. Ce sur quoi, après un moment de flottement, l’aurait rassuré la Ministre fédérale allemande.

La contribution des Dirigeants allemands a essentiellement concerné la nécessaire rapide digitalisation de l’agriculture qui doit aider à pouvoir nourrir d’ici 2050 les 2 milliards d’humains que la Terre est alors réputée compter en plus. L’Allemagne vient de demander à la FAO de travailler le sujet et de faire rapidement des propositions, ce qui fut confirmé dans l’intervention du Directeur Général de la FAO, José Graziano da Silva. Il a, entre autres, expliqué que la digitalisation est tout particulièrement importante pour « les pays dans lesquels l’agriculture n’est pas entre les mains de quelques groupes géants ». Les Ministres de l’Agriculture de 74 pays ont, dans le cadre de la Conférence Internationale des Ministres de l’Agriculture décidé de créer un Conseil de la Digitalisation en Agriculture. Pour ce qui est de l’Allemagne, Julia Klöckner a annoncé que 70 millions € seront investis d’ici 2022 pour des opérations-tests de natures variées (déjà en cours de sélection) dans tous les Länder de la République fédérale.

Pour ce qui est de l’allocution de Phil Hogan le vendredi - en présence de la Chancelière - il a, entre autres, confirmé:
  • que partant des conséquences de l’embargo russe, en particulier pour ce qui est des fruits et légumes, ses Services travaillent à d’éventuelles « mesures d’aides Brexit »
  • qu’il espère avoir pour octobre 2019 le cadre financier 2021-2027 pour savoir combien y restera disponible pour la PAC
  • qu’il espère que P.E. et Commission se seront mis d’accord avant les élections de ce mois de mai sur les principes de la PAC à venir (!!!) … ce qui n’est pas le cas actuellement…
  • qu’il n’est pas en mesure de répondre aux questions sur le pourcentage des aides directes qui sera « lié à l’écologie ».


Quelques données et informations générales recueillies sur place, à Berlin, en marge des rendez-vous laitiers dont il est question ci-après :

- Dans l’édition du vendredi 18 de la Circulaire électronique laitière hebdomadaire du DBV, il est rendu compte en ces termes de la Rencontre de Travail DBV-Laiteries ayant eu lieu en milieu de semaine passée : « Les plus importants Représentants de la transformation laitière (NDLR : le MIV n’est pas mentionné en tant que tel mais les participants furent MM. Stahl (Président du MIV/DG de Hochland), Holtorf (Vice-Président du MIV/DG de Frischli), Hofmeister (Membre du Conseil MIV/DG de Champignon), Latka (Membre du Conseil MIV/DG de Hochwald, entreprise qui, dans la foulée, a rendu public le dispositif de prix fixe qu’elle propose à ses producteurs et dont nous vous avons transmis les détails disponibles via notre traduction Top Agrar que nous vous avons adressée samedi dernier) se sont retrouvés, à la veille de l’ouverture de la Semaine Verte, pour une réunion d’échanges avec Rückwied, Président du DBV et Schmal, Vice-Président du DBV, en charge du lait. Il y a été convenu d’accélérer les travaux d’élaboration d’une Stratégie Lait 2030 et d’inviter d’autres acteurs du secteur laitier à y participer de façon constructive. La création d’instruments privés de gestion de la volatilité des prix a constitué un autre thème d’échanges. Enfin, il y fut également question des moyens à mettre en œuvre pour que la mise en place de standards ne créée pas une concurrence malsaine sur le dos des producteurs. »

- Dans sa Conférence « Semaine Verte » le BDM (Syndicat dissident du DBV) a représenté tous les points de sa position : 
  • il n’est plus admissible que les producteurs aient à assumer seuls les conséquences financières découlant des fluctuations de marché
  • définir la Stratégie Lait 2030 est la priorité
  • création d’une structure laitière regroupant l’ensemble des producteurs de lait
  • véritable mise à disposition des producteurs, en temps réel, des informations de marché
  • renouvellement total des relations contractuelles producteurs-laiteries qui datent du 19ème siècle
  • reformulation de la PAC qui, depuis la Réforme Mac Sharry est plus au service de l’industrie alimentaire que des producteurs agricoles. 

Le dédommagement en cas de diminution volontaire de sa production par un producteur est réputé rester d’actualité. Au cours du Symposium BDM du 21 janvier sont, entre autres intervenus d’une part un producteur américain du Wisconsin qui a expliqué que les producteurs commencent à s’y organiser au sein de « Dairy Together » pour contribuer à adapter l’offre, d’autre part le Vice-Président de la Fédération des Producteurs de l’Ontario (Canada) qui a expliqué que les politiques canadiens sont, en fait, satisfaits des laitiers « qui ne sont pas en permanence en train de leur demander des sous ».

- Le différend Lactalis-OOMV qui a défrayé la chronique laitière outre-Rhin depuis deux semaines fut évidemment évoqué lors des rendez-vous laitiers de la Semaine Verte, la tonalité étant à présent qu’il est « impératif de trouver le chemin d’un consensus » et ce dans l’intérêt des deux protagonistes et non pas d’un seul… Le contrat d’approvisionnement conclu courant encore pour les 9 années à venir (Letztlich habe man einen Milchliefervertrag, der noch neun Jahre laufe).

- Dans le Land Bayern la confrontation entre Producteurs et Transformateurs au sein de milch.bayern (Interprofession laitière sauce bavaroise) sur le thème de l’entravement à l’année des vaches laitières a, la semaine passée, été évité de justesse, les laiteries ayant annoncé à la veille de Noël que 2030 constitue pour elles la date-butoir (50% des vaches laitière bavaroises sont actuellement entravées, et pour 80% de celles-ci c’est à l’année). Rendez-vous a été pris pour mettre sur pied un calendrier et des modalités…

- Dans le cadre de la Conférence de Presse de l’Association des Exportateurs GEFA, le MIV a expliqué qu’en 2018 les recettes de l’exportation de produits laitiers se sont améliorées malgré des pertes de parts de marchés. Par ailleurs les prix du beurre et des poudres grasses se situent à un niveau plus élevé sur le marché européen que sur les marchés extérieurs. Les principaux clients de la Laiterie Allemagne sont, dans l’ordre : 
  • Chine - Mauritanie - Philippines pour le lait de consommation
  • Japon - EAU - Iran pour le beurre et le butteroil
  • Chine - Egypte - République Dominicaine pour le lait en poudre
  • Japon - Suisse - Chili - USA - Corée du Sud - Bosnie-Herzegovine -Libye - Arabie Saoudite - Afrique du Sud pour les fromages.

QUE RETENIR 

DES TROIS RENDEZ-VOUS LAITIERS ?


LE RENDEZ-VOUS DU DBV (21.01.2019)

 



Le DBV, Syndicat majoritaire des exploitants agricoles allemands, avait intitulé cette année son Séminaire Laitier « Stratégie 2030 : de quoi ont besoin nos producteurs de lait ? » (NDLR : en v.o. Strategie 2030 : Was brauchen unsere Milchbauern ?).  
  
Y sont successivement intervenus :

  • Joachim Ruckwied, Président du DBV qui a, comme les années précédentes, introduit l’évènement…
  • Karsten Schmal, Vice-Président du DBV, en charge du lait, sur le thème des priorités du DBV pour ce qui est de la définition d’une Stratégie Lait 2030
  • Thomas Huber, DG de la Société de Consulting ToChange GmbH sur le thème « Quels sont les éléments nécessaires à une Stratégie partagée ? », intervention suivie d’un débat
  • Holger D. Thiele, Directeur du célèbre Institut de Kiel sur le thème « Que peut et que ne peut pas apporter une Interprofession ? », intervention suivie d’un débat
  • Klaus Heitlinger, Directeur de la Fédération allemande des jus de fruits sur le thème « Que peut apporter la promotion collective ? », intervention suivie d’un débat

Le mot de la fin revenant évidemment à Karsten Schmal.


Dans sa présentation des priorités du DBV pour ce qui est de la définition et de la mise en place d’une Stratégie Lait 2030, Karsten Schmal a expliqué les 3 priorités en la matière pour les producteurs :
  • conserver la compétitivité de la production laitière allemande et accroître la part de valeur ajoutée revenant aux producteurs
  • maîtriser les risques de production
  • assurer l’acceptation sociétale de la production laitière moderne

Avec ou sans Interprofession il faut œuvrer à :
  • exploiter tous les segments générant de la valeur ajoutée
  • renforcer les Groupements et les Coopératives de Producteurs
  • dans toute la mesure du possible, essayer de créer une Interprofession laitière « avec ceux qui le veulent bien »
  • se mettre enfin en position de pouvoir utiliser « l’argent de Bruxelles » (200 millions €/an) pour la promotion
  • participer au débat sociétal environnement et bien-être animal pour y devenir force de proposition et ne plus devoir se contenter d’être une « force de réaction »
  • travailler à la mitigation des conséquences des risques climatiques, sanitaires, économiques (volatilité des prix)
  • travailler à une communication sociétale du secteur, pour partie sur la base de standards du secteur à élaborer au sein de celui-ci.

Le Consultant Thomas Huber a d’emblée souligné que la clef du succès est que l’exercice soit, pour l’essentiel, conduit par ceux qui auront les rôles principaux dans sa mise en œuvre.

Des questions posées au Consultant et aux panelistes et des réponses qu’ils y ont apportées, on retiendra essentiellement :
  • les Pouvoirs Publics se réjouissent de cet exercice « Stratégie Lait 2030 » mais n’y participeront évidemment pas en tant que tels
  • H. Korte, le Président de DMK, estime nécessaire d’avoir recours à un intervenant extérieur pour donner toutes ses chances au processus
  • pour le DBV les Standards de qualité doivent être proposés par le secteur pour éviter que ne se reproduise ce qui s’est passé dans le cadre du dossier OGM où la Distribution a fait la loi et où la valeur ajoutée n’est pas remontée jusqu’aux producteurs

L’Universitaire Holger D. Thiele a ajouté qu’il faut impérativement maximiser l’adhésion des membres faute de quoi l’exercice se réduira à une minimisation des différences. Et éviter les doublons, tant des structures elles-mêmes que concernant les thèmes travaillés.


Klaus Heitlinger a exposé avec quel bonheur les fabricants de jus de fruits allemands se font largement financer leur promotion (ils n’en font que sur le marché allemand, pas à l’exportation) par l’enveloppe annuelle UE de 200 millions € (qui couvre 70% de la dépense si cela ne concerne qu’un pays et 80% si plusieurs sont concernés). La consommation de jus de fruits et boissons à base de fruits stagne en Allemagne ces dernières années, mais les entreprises du secteur estiment que cela pourrait être pire sans promotion.

Conclusion de Karsten Schmal, Vice-Président du DBV, en deux phrases :
  • « nous sommes sur le bon chemin mais nous sommes trop lents »
  • « celui qui veut trouve des chemins, celui qui ne veut pas cherche des arguments »

LES RENDEZ-VOUS DU MIV 





DÎNER DE GALA DU MIV (21.01.2019)


C’est dans l’écrin du Bärensaal de l’ancien Hôtel de Ville que le MIV avait, cette année, convié ses 217 invités.

Le président du MIV, Peter Stahl, CEO de Hochland, s’est, cette année, contenté de souhaiter (mais chaleureusement !) la bienvenue aux invités.

De l’intervention « convenue » du Secrétaire d’Etat à l’alimentation et à l’Agriculture (depuis plus de 10 ans !), Hans-Joachim Fuchtel, on retiendra que ses priorités sont la création d’une Interprofession « ou de quelque chose qui lui ressemble » d’une part, le soutien de l’export d’autre part. Le Ministère a d’ores et déjà renouvelé jusqu’à fin 2021 sa participation financière au Bureau co-géré à Pékin par le MIV et ses collègues des produits carnés. Il s’est, par ailleurs, dans le cadre de l’Accord de libre-échange UE-Japon félicité d’avoir été le premier à faire le déplacement sur place, grillant pour une fois la politesse aux Français qui sont les spécialistes de la pole-position en la matière. Les Pouvoirs Publics regrettent beaucoup que, du fait de son inorganisation, le secteur laitier allemand ne soit pas en mesure de taper dans l’enveloppe annuelle de 200 millions € disponible à Bruxelles pour la promotion …



ATELIER MIV (22.01.2019)


Animé, comme les années précédentes, avec dynamisme et brio par le journaliste agricole Anselm Richard, cette matinée (NDLR : en v.o. « Frühschoppen ») où, traditionnellement, chacun s’exprime en toute liberté, ou bien, comme a dit l’organisateur, « où chacun vient dire ce qu’il a sur l’estomac », constitue un « happening » dont se sont à nouveau régalés les participants au nombre de 253 cette année ! Et le Président Stahl a indiqué « et nous avons malheureusement dû refuser du monde ».

Pour « chauffer la salle » et préparer les vigoureux échanges sur le thème « bien-être animal » le MIV avait invité les intervenants suivants :


  • Katharina Kluge, Responsable de cette problématique au Ministère fédéral de l’Alimentation et de l’Agriculture
  • Thomas Schröder, Président du Deutscher Tierschutzbund (Confédération de toutes les Fédérations et Associations actives en matière de protection de l’environnement / bien-être animal, la plus grosse ONG d’Allemagne
  • Christoph Bossmann, Directeur général de la petite Laiterie de la Côte de la Mer du Nord, Osterhusumer Meierei Witzwort eG
  • Jan Heusmann, Eleveur dans le Land Niedersachsen et Président de « l’interprofession laitière » du Land Niedersachsen.

Le thème était donc, cette année, bien-être animal (Tierwohl) et secteur laitier.

Principaux points à retenir des interventions et des échanges qu’ils ont suscité :

-  Katharina Kluge (Ministère fédéral de l’Alimentation et de l’Agriculture)
Après la seconde Guerre Mondiale il a fallu, en Allemagne et en Europe,  pousser la production agricole et personne ne s’est alors préoccupé du bien-être animal dans le choix et le développement des types d’élevages choisis et promus. Il est donc injuste de critiquer « à la légère » les éleveurs qui doivent néanmoins intégrer qu’aujourd’hui les consommateurs veulent savoir comment sont produites les denrées agricoles. Et les transformateurs de l’industrie alimentaire, en l’occurrence laitière, sont sur le même bateau car la demande est identique en matière de process de fabrication. Historiquement, les mouvements ayant œuvré à la quasi-disparition des expériences sur animaux pour développer des produits cosmétiques, voire pharmaceutiques, furent précurseurs. Puis sont arrivés les élevages de porcs, puis de volailles … « et vous êtes bien inspirés dans le secteur laitier à vous mettre dès à présent au travail en la matière » puisque sont déjà sur la table les pratiques des abattoirs (y compris pour les vaches laitières), l’écornage, l’entravement, … Le label "Bien-être animal" que vont mettre en œuvre les Pouvoirs Publics fédéraux (le projet est en période de notification à Bruxelles et les textes d’application en cours de rédaction) n’est qu’un instrument, parmi d’autres, pour répondre à la demande sociétale en matière de bien-être animal. Il comporte 3 niveaux qui sont tous supérieurs au minimum légal. Les Contrôleurs du Dispositif seront eux-mêmes contrôlés par un Service du Ministère fédéral qui sera créé à cet effet. Le dispositif sera volontaire et non pas obligatoire, UE oblige entre autres...
   
-  Thomas Schröder (Président du Deutscher Tierschutzbund)
Cette puissante ONG (Confédération de Fédérations et d’Associations environnementalistes et de protection animale) - il se dit que c’est la plus grosse ONG d’Allemagne - constate qu’effectivement, là où se construisent de nouvelles étables, les choses vont mieux en matière de bien-être animal. Pour son Président pas question « d’autrefois tout était mieux » ni de « petit c’est bien, grand c’est pas bien ». Ceci étant, pour l’obtention du label est quand même prévue une taille maximale (350 vaches semble-t-il) mais qui n’a rien à voir avec le bien-être animal, mais exigée par la composante environnementaliste de la Confédération (Bund).

Pour ne pas se fourvoyer et être crédible il faut être capable d’exprimer une vision à 10 ou 20 ans. Le Bund est défavorable au caractère volontaire et donc non-obligatoire de ce que vont mettre en place les Pouvoirs Publics en la matière. Il se réjouit par contre de l’ITW (Initiative Tierwohl) pour un label commun aux grands de la Distribution à compter du 1er avril prochain pour arrêter la cacophonie qui menace… mais demande aux Enseignes d’arrêter de faire, en même temps, des promotions de produits carnés à vil prix. Sa conclusion : « attention, le consommateur n’est pas là pour compenser avec son porte-monnaie l’inorganisation des filières ».


-  Christoph Bossmann (DG de la Laiterie Osterhusumer Meierei… laiterie qui a sauté le pas et appose le label du Bund sur son lait de pâturage! 
L’essentiel de ses débouchés est sur le marché en décroissance du lait de consommation et il est impératif pour elle de se diversifier en commercialisant des produits « qui racontent une histoire ». 25 de ses producteurs se sont engagés dans cette voie et ont, pour ce faire, chacun investi entre 100.000 et 250.000€ sur leur exploitation. Présentement leur prix du lait est supérieur de 4 cents à celui des autres producteurs. Au passage le DG d’Osterhusumer Meierei a critiqué le coût trop important du dispositif… et, ô surprise, indiqué qu’il se vend plus de ce lait-là dans le Sud de l’Allemagne (loin de la laiterie !) que dans le Nord de l’Allemagne (aux portes de la laiterie !). La laiterie gère une liste d’attente des producteurs qui souhaitent rejoindre le dispositif mais conditionne leur admission au développement de ses débouchés…

-  Jan Heusmann (Producteur de lait du Land Niedersachsen et Président de l’Association laitière de celui-ci)
Jan Heusmann constate que les producteurs se sont résolument engagés dans le cadre de cette problématique. Il en veut pour preuve qu’après avoir introduit des paramètres de santé animale dans le suivi des « turbo-vaches » on constate, depuis le début des années 2000, que l’augmentation du rendement par vache n’est plus corélé à une diminution de son bien-être.

Au cours de la discussion il a été rappelé que dans une intéressante Etude de l’Université de Göttingen datant d’il y a une dizaine d’années deux stratégies étaient apparues possibles pour augmenter le bien-être animal : soit on prend comme point de départ un niveau très supérieur au minimum légal et on procède par développements successifs de niches, soit on part plus ou moins du minimum légal pour ratisser large dès le départ. Julia Klöckner est réputée avoir choisi cette seconde option, bien que le DBV lui demande déjà de baisser encore les exigences du niveau de départ !

Il a également été rappelé qu’il reste difficile de mesurer le bien-être animal du fait de la quasi-absence d’indicateurs en provenance directe des animaux… ce qui conduit à se concentrer, entre autres, sur l’environnement de l’animal. Il est un peu désespérant que l’on mette tant de temps à élaborer un vocabulaire commun qui permettent aux éleveurs-laiteries-distributeurs-consommateurs de s’assurer qu’ils parlent bien de la même chose.

Dans une vigoureuse intervention le Président des Producteurs de lait de Bavière a estimé que les ONG du secteur ne sont pas vraiment intéressées par des solutions qui peuvent être réellement mises en œuvre, leur objectif « in fine » étant la disparition complète des animaux d’élevage. Intervention très critiquée par le Président du Bund qui espère que les milieux agricoles considèrent que c’est une chance pour eux qu’on veuille faire évoluer le monde avec eux et non pas contre eux.


De la Conférence de Presse MIV qui a suivi, nous avons pour l’essentiel retenu des réponses des Dirigeants du MIV aux questions des journalistes que :

·     Brexit non inclus, l’année laitière 2019 débute sous de meilleurs auspices que ne l’avait fait 2018 qui s’est soldée par une collecte de 32.4 millions T. Le prix moyen à la production servi l’an passé fut de 34.5 cents (supérieur à la moyenne des dix dernières années, mais inférieur à celui de 2017 qui fut de 36.2 cents).
·  Le MIV étudie depuis des années avec l’Institut Thünen de Braunschweig et le concours actif de 34 laiteries la problématique durabilité, thème qui inclut le bien-être animal. Et là deux options sont possibles : soit on établit un standard de base de niveau élevé avec pour but de faire progresser tout le monde par capillarité, soit on établit un standard de base de faible niveau afin d’embarquer un maximum de la production dès le départ.  L’Etude en question bénéficie du concours financier des Pouvoirs Publics fédéraux (BLE).
·    Si ce n’était pas le cas « auparavant », à présent les laiteries sont, « que cela leur plaise ou non » intégrées par l’opinion publique à la problématique bien-être animal : il est donc fondamental pour elles « d’être en chemin » également sur ce thème.
·    « Les choses avancent doucement » sur le chantier « Stratégie Lait 2030 » initié ici il y a un an par Ingo Müller, le DG de DMK. Le Conseil du MIV s’en est saisi lors de sa réunion de février 2018 à Bruxelles, un Groupe de Travail a proposé un texte au Conseil de juillet 2018 qui l’a adopté. Il a ensuite été avalisé à l’unanimité par l’AG MIV d’octobre dernier. Depuis, le DBV, le DRV et, plus récemment, le BDM en ont fait de même. A ce stade ces documents (qui n’ont pas d’architecture commune et des thèmes spécifiques à chacun d’entre eux à côté de quelques autres communs à tous) sont dans l’attente d’un synopsis qui présente « les points d’accord et les points où les positions sont actuellement différenciées », dont l’élaboration a été l’objet d’une première réunion DBV-MIV la semaine passée à la veille de l’ouverture de la Semaine Verte. Pour l’instant les uns estiment nécessaire de recourir à un(des) Consultant(s) et (ou à) un Facilitateur dans le cadre des travaux à venir, les autres non… L’objectif est d’essayer de produire un premier document pour l’été 2019. En réponse à une question il a été confirmé que le MIV ne souhaite pas la création d’une Interprofession laitière (Branchenorganisation). NDLR : dans certains des Länder qui constituent la République fédérale, mais pas dans tous, une « cvo laitière » est prélevée (en Bavière il s’agit à présent d’une cotisation) et dans deux de ces Länder elle finance des « Landesvereinigungen der Milchwirtschaft » où travaillent ensemble producteurs et transformateurs, en particulier en matière de promotion, communication et relations publiques.


                            Nathaleen Hewitt & Philippe Jachnik
                                                                                 22.01.2019







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