Sur proposition de notre trésorier, voici un article en date du 22 janvier 2019, signé de Nathaleen Hewitt et Philippe Jachnik, qui rapporte ce qu'il convient de retenir du symposium de la Grüne Woche, la Semaine Verte, de Berlin.
L’EDITION 2019 DE LA SEMAINE VERTE
(18-27.01.2019)
ET LES LAITIERS…
Créée en 1926, il y a 93 ans, la Semaine Verte de
Berlin en est à sa 84ème édition, années de guerre obligent. Cette édition
2019 (dont l’Invité d’Honneur fut la Finlande) était parrainée, comme déjà l’an
passé, non seulement par les Ministères fédéraux de l’Alimentation et de
l’Agriculture d’une part, de l’Environnement d’autre part mais également par un
troisième, celui du Développement et de la Coopération Economique. Le
développement des pays pauvres et émergents et, partant, la « fixation sur
place des populations pouvant avoir vocation aux migrations sauvages et
risquées », ce qui passe par le développement de l’agriculture et la
structuration de la ruralité, reste un thème récurrent de premier plan en
Allemagne.
Les impressionnantes manifestations de masse dans
les rues de Berlin (35.000 participants selon les organisateurs, 15.000 selon
la police) le samedi 19 pour « une autre agriculture et une autre
alimentation », pour « une autre politique agricole » font,
depuis des années, partie du paysage. 2019 a bien été à la hauteur de cette
tradition avec, le samedi, en plus des dizaines de milliers de manifestants,
près de 150 tracteurs et poids lourds venus de toute l’Allemagne pour dénoncer l’agriculture
industrielle productiviste et le manque d’ambition de la Ministre fédérale de
l’Alimentation et de l’Agriculture, Julia Klöckner (CDU, proche de la
Chancelière Merkel), en poste depuis mars dernier, tant en matière de bien-être
animal que de redéfinition de la PAC et de ses postes de dépenses (là le
message est qu’actuellement 70% des dépenses agricoles européennes sont
« contre-productives » compte tenu de comment il faut les utiliser).
Des nombreux discours de Responsables agricoles et
d’ONG consuméristes on retiendra avant tout que ces multiples structures ont en
commun une vision de l’avenir faite d’exploitations agricoles diversifiées et
non pas d’un quasi-monopole de quelques structures dites agro-industrielles.
Cette méga-manifestation avait, là aussi comme
lors des éditions précédentes, été précédée, durant trois jours, à partir du
mercredi, de nombreux Ateliers, Conférences de Presse, Rencontres (dont une
entre les Dirigeants du DBV et ceux du MIV sur le thème Stratégie Laitière 2030
& Interprofession) ainsi que du célèbre et international GFFA ( Global Forum
for Food and Agriculture) dont Julia KLöckner dit que c’est « Le Davos de
l’Agriculture ». Plus de 70 Ministres de l’Agriculture y ont participé ainsi
que, pour l’Allemagne Angela Merkel et Julia Klöckner et pour la Commission UE
Phil Hogan et Vytenis Andriukaitis (Santé), ce dernier sur le très discuté
thème du bien-être animal. Il a, au passage, expliqué qu’il est devenu
important et urgent de mettre en place un partenariat santé animale avec les
Autorités du Belarus, de la Moldavie, de la Russie et de l’Ukraine.
Concernant le projet des Autorités allemandes
d’étiquetage du bien-être animal il a insisté sur le fait que, dans ce domaine
aussi, des initiatives de tel ou tel Etat-membre ne peuvent avoir pour
conséquence de battre en brèche la libre-circulation des marchandises au sein
de l’UE. Ce sur quoi, après un moment de flottement, l’aurait rassuré la
Ministre fédérale allemande.
La contribution des Dirigeants allemands a
essentiellement concerné la nécessaire rapide digitalisation de l’agriculture
qui doit aider à pouvoir nourrir d’ici 2050 les 2 milliards d’humains que la
Terre est alors réputée compter en plus. L’Allemagne vient de demander à la FAO
de travailler le sujet et de faire rapidement des propositions, ce qui fut
confirmé dans l’intervention du Directeur Général de la FAO, José Graziano da
Silva. Il a, entre autres, expliqué que la digitalisation est tout
particulièrement importante pour « les pays dans lesquels l’agriculture
n’est pas entre les mains de quelques groupes géants ». Les Ministres de
l’Agriculture de 74 pays ont, dans le cadre de la Conférence Internationale des
Ministres de l’Agriculture décidé de créer un Conseil de la Digitalisation en
Agriculture. Pour ce qui est de l’Allemagne, Julia Klöckner a annoncé que 70
millions € seront investis d’ici 2022 pour des opérations-tests de natures
variées (déjà en cours de sélection) dans tous les Länder de la République
fédérale.
Pour ce qui est de l’allocution de Phil Hogan le
vendredi - en présence de la Chancelière - il a, entre autres, confirmé:
- que partant des conséquences de
l’embargo russe, en particulier pour ce qui est des fruits et légumes, ses
Services travaillent à d’éventuelles « mesures d’aides Brexit »
- qu’il espère avoir pour octobre 2019 le cadre financier 2021-2027 pour savoir
combien y restera disponible pour la PAC
- qu’il espère que P.E. et Commission se
seront mis d’accord avant les élections de ce mois de mai sur les principes de
la PAC à venir (!!!) … ce qui n’est pas le cas actuellement…
- qu’il n’est pas en mesure de répondre
aux questions sur le pourcentage des aides directes qui sera « lié à
l’écologie ».
Quelques
données et informations générales recueillies sur place, à Berlin, en marge des
rendez-vous laitiers dont il est question ci-après :
- Dans l’édition du vendredi 18 de la Circulaire
électronique laitière hebdomadaire du DBV, il est rendu compte en ces termes de
la Rencontre de Travail DBV-Laiteries ayant eu lieu en milieu de semaine
passée : « Les plus importants Représentants de la
transformation laitière (NDLR : le MIV
n’est pas mentionné en tant que tel mais les participants furent MM. Stahl
(Président du MIV/DG de Hochland), Holtorf (Vice-Président du MIV/DG de
Frischli), Hofmeister (Membre du Conseil MIV/DG de Champignon), Latka (Membre
du Conseil MIV/DG de Hochwald, entreprise qui, dans la foulée, a rendu public
le dispositif de prix fixe qu’elle propose à ses producteurs et dont nous vous
avons transmis les détails disponibles via notre traduction Top Agrar que nous
vous avons adressée samedi dernier) se sont retrouvés, à la veille de
l’ouverture de la Semaine Verte, pour une réunion d’échanges avec Rückwied,
Président du DBV et Schmal, Vice-Président du DBV, en charge du lait. Il y a
été convenu d’accélérer les travaux d’élaboration d’une Stratégie Lait 2030 et
d’inviter d’autres acteurs du secteur laitier à y participer de façon
constructive. La création d’instruments privés de gestion de la volatilité des
prix a constitué un autre thème d’échanges. Enfin, il y fut également question
des moyens à mettre en œuvre pour que la mise en place de standards ne créée
pas une concurrence malsaine sur le dos des producteurs. »
- Dans sa Conférence « Semaine Verte »
le BDM (Syndicat dissident du DBV) a représenté tous les points de sa
position :
- il n’est plus admissible que les producteurs aient à assumer
seuls les conséquences financières découlant des fluctuations de marché
- définir la Stratégie Lait 2030 est la priorité
- création d’une structure
laitière regroupant l’ensemble des producteurs de lait
- véritable mise à
disposition des producteurs, en temps réel, des informations de marché
- renouvellement total des relations contractuelles producteurs-laiteries qui
datent du 19ème siècle
- reformulation de la PAC qui, depuis la
Réforme Mac Sharry est plus au service de l’industrie alimentaire que des
producteurs agricoles.
Le dédommagement en cas de diminution volontaire de sa
production par un producteur est réputé rester d’actualité. Au cours du
Symposium BDM du 21 janvier sont, entre autres intervenus d’une part un
producteur américain du Wisconsin qui a expliqué que les producteurs commencent
à s’y organiser au sein de « Dairy Together » pour contribuer à
adapter l’offre, d’autre part le Vice-Président de la Fédération des
Producteurs de l’Ontario (Canada) qui a expliqué que les politiques canadiens
sont, en fait, satisfaits des laitiers « qui ne sont pas en permanence en train
de leur demander des sous ».
- Le différend Lactalis-OOMV qui a défrayé la
chronique laitière outre-Rhin depuis deux semaines fut évidemment évoqué lors
des rendez-vous laitiers de la Semaine Verte, la tonalité étant à présent qu’il
est « impératif de trouver le chemin d’un consensus » et ce dans
l’intérêt des deux protagonistes et non pas d’un seul… Le contrat
d’approvisionnement conclu courant encore pour les 9 années à venir (Letztlich
habe man einen Milchliefervertrag, der noch neun Jahre laufe).
- Dans le Land Bayern la confrontation entre
Producteurs et Transformateurs au sein de milch.bayern (Interprofession
laitière sauce bavaroise) sur le thème de l’entravement à l’année des vaches
laitières a, la semaine passée, été évité de justesse, les laiteries ayant
annoncé à la veille de Noël que 2030 constitue pour elles la date-butoir (50%
des vaches laitière bavaroises sont actuellement entravées, et pour 80% de
celles-ci c’est à l’année). Rendez-vous a été pris pour mettre sur pied un
calendrier et des modalités…
- Dans le cadre de la Conférence de Presse de
l’Association des Exportateurs GEFA, le MIV a expliqué qu’en 2018 les recettes
de l’exportation de produits laitiers se sont améliorées malgré des pertes de
parts de marchés. Par ailleurs les prix du beurre et des poudres grasses se
situent à un niveau plus élevé sur le marché européen que sur les marchés
extérieurs. Les principaux clients de la Laiterie Allemagne sont, dans
l’ordre :
- Chine - Mauritanie - Philippines pour le lait de consommation
- Japon - EAU - Iran pour le beurre et le butteroil
- Chine - Egypte - République
Dominicaine pour le lait en poudre
- Japon - Suisse - Chili - USA - Corée du Sud - Bosnie-Herzegovine -Libye - Arabie Saoudite - Afrique du Sud pour les fromages.
QUE RETENIR
DES
TROIS RENDEZ-VOUS LAITIERS ?
LE RENDEZ-VOUS DU
DBV (21.01.2019)
Le DBV, Syndicat majoritaire des exploitants
agricoles allemands, avait intitulé cette année son Séminaire Laitier « Stratégie
2030 : de quoi ont besoin nos producteurs de lait ? » (NDLR : en v.o. Strategie 2030 : Was
brauchen unsere Milchbauern ?).
Y sont successivement intervenus :
- Joachim Ruckwied, Président du DBV qui a, comme
les années précédentes, introduit l’évènement…
- Karsten Schmal, Vice-Président du DBV, en charge
du lait, sur le thème des priorités du DBV pour ce qui est de la définition
d’une Stratégie Lait 2030
- Thomas Huber, DG de la Société de Consulting
ToChange GmbH sur le thème « Quels sont les éléments nécessaires à une
Stratégie partagée ? », intervention suivie d’un débat
- Holger D. Thiele, Directeur du célèbre Institut
de Kiel sur le thème « Que peut et que ne peut pas apporter une
Interprofession ? », intervention suivie d’un débat
- Klaus Heitlinger, Directeur de la Fédération
allemande des jus de fruits sur le thème « Que peut apporter la promotion
collective ? », intervention suivie d’un débat
Le mot de la fin revenant évidemment à Karsten
Schmal.
Dans sa présentation des priorités du DBV pour ce
qui est de la définition et de la mise en place d’une Stratégie Lait 2030,
Karsten Schmal a expliqué les 3 priorités en la matière pour les
producteurs :
- conserver la compétitivité de la production
laitière allemande et accroître la part de valeur ajoutée revenant aux
producteurs
- maîtriser
les risques de production
- assurer
l’acceptation sociétale de la production laitière moderne
Avec ou sans Interprofession il faut œuvrer à :
- exploiter
tous les segments générant de la valeur ajoutée
- renforcer les Groupements et les Coopératives de
Producteurs
- dans toute la mesure du possible, essayer de
créer une Interprofession laitière « avec ceux qui le veulent bien »
- se mettre enfin en position de pouvoir utiliser
« l’argent de Bruxelles » (200 millions €/an) pour la promotion
- participer au débat sociétal environnement et
bien-être animal pour y devenir force de proposition et ne plus devoir se
contenter d’être une « force de réaction »
- travailler à la mitigation des conséquences des
risques climatiques, sanitaires, économiques (volatilité des prix)
- travailler à une communication sociétale du
secteur, pour partie sur la base de standards du secteur à élaborer au sein de
celui-ci.
Le Consultant Thomas Huber a d’emblée souligné que
la clef du succès est que l’exercice soit, pour l’essentiel, conduit par ceux
qui auront les rôles principaux dans sa mise en œuvre.
Des questions posées au Consultant et aux
panelistes et des réponses qu’ils y ont apportées, on retiendra
essentiellement :
- les Pouvoirs Publics se réjouissent de cet
exercice « Stratégie Lait 2030 » mais n’y participeront évidemment
pas en tant que tels
- H. Korte, le Président de DMK, estime nécessaire
d’avoir recours à un intervenant extérieur pour donner toutes ses chances au
processus
- pour le DBV les Standards de qualité doivent
être proposés par le secteur pour éviter que ne se reproduise ce qui s’est
passé dans le cadre du dossier OGM où la Distribution a fait la loi et où la
valeur ajoutée n’est pas remontée jusqu’aux producteurs
L’Universitaire Holger D. Thiele a ajouté qu’il faut impérativement maximiser l’adhésion des membres faute de quoi
l’exercice se réduira à une minimisation des différences. Et éviter les
doublons, tant des structures elles-mêmes que concernant les thèmes travaillés.
Klaus Heitlinger a exposé avec quel bonheur les
fabricants de jus de fruits allemands se font largement financer leur promotion
(ils n’en font que sur le marché allemand, pas à l’exportation) par l’enveloppe
annuelle UE de 200 millions € (qui couvre 70% de la dépense si cela ne concerne
qu’un pays et 80% si plusieurs sont concernés). La consommation de jus de fruits
et boissons à base de fruits stagne en Allemagne ces dernières années, mais
les entreprises du secteur estiment que cela pourrait être pire sans promotion.
Conclusion de Karsten Schmal, Vice-Président du
DBV, en deux phrases :
- « nous sommes sur le bon chemin mais nous
sommes trop lents »
- « celui qui veut trouve des chemins, celui
qui ne veut pas cherche des arguments »
LES RENDEZ-VOUS DU
MIV
DÎNER DE GALA DU MIV (21.01.2019)
C’est
dans l’écrin du Bärensaal de l’ancien Hôtel de Ville que le MIV avait, cette
année, convié ses 217 invités.
Le
président du MIV, Peter Stahl, CEO de Hochland, s’est, cette année, contenté de
souhaiter (mais chaleureusement !) la bienvenue aux invités.
De
l’intervention « convenue » du Secrétaire d’Etat à l’alimentation et
à l’Agriculture (depuis plus de 10 ans !), Hans-Joachim Fuchtel, on
retiendra que ses priorités sont la création d’une Interprofession « ou de
quelque chose qui lui ressemble » d’une part, le soutien de l’export
d’autre part. Le Ministère a d’ores et déjà renouvelé jusqu’à fin 2021 sa
participation financière au Bureau co-géré à Pékin par le MIV et ses collègues
des produits carnés. Il s’est, par ailleurs, dans le cadre de l’Accord de
libre-échange UE-Japon félicité d’avoir été le premier à faire le déplacement
sur place, grillant pour une fois la politesse aux Français qui sont les
spécialistes de la pole-position en la matière. Les Pouvoirs Publics regrettent
beaucoup que, du fait de son inorganisation, le secteur laitier allemand ne
soit pas en mesure de taper dans l’enveloppe annuelle de 200 millions €
disponible à Bruxelles pour la promotion …
ATELIER MIV (22.01.2019)
Animé,
comme les années précédentes, avec dynamisme et brio par le journaliste
agricole Anselm Richard, cette matinée (NDLR :
en v.o. « Frühschoppen ») où, traditionnellement, chacun s’exprime en
toute liberté, ou bien, comme a dit l’organisateur, « où chacun vient dire
ce qu’il a sur l’estomac », constitue un « happening » dont se sont à
nouveau régalés les participants au nombre de 253 cette année ! Et le
Président Stahl a indiqué « et nous avons malheureusement dû refuser du
monde ».
Pour
« chauffer la salle » et préparer les vigoureux échanges sur le thème
« bien-être animal » le MIV avait invité les intervenants
suivants :
- Katharina
Kluge, Responsable de cette problématique au Ministère fédéral de
l’Alimentation et de l’Agriculture
- Thomas
Schröder, Président du Deutscher Tierschutzbund (Confédération de toutes les
Fédérations et Associations actives en matière de protection de l’environnement
/ bien-être animal, la plus grosse ONG d’Allemagne
- Christoph
Bossmann, Directeur général de la petite Laiterie de la Côte de la Mer du Nord,
Osterhusumer Meierei Witzwort eG
- Jan
Heusmann, Eleveur dans le Land Niedersachsen et Président de
« l’interprofession laitière » du Land Niedersachsen.
Le
thème était donc, cette année, bien-être animal (Tierwohl) et secteur laitier.
Principaux
points à retenir des interventions et des échanges qu’ils ont suscité :
- Katharina Kluge (Ministère fédéral de
l’Alimentation et de l’Agriculture)
Après
la seconde Guerre Mondiale il a fallu, en Allemagne et en Europe, pousser la production agricole et personne
ne s’est alors préoccupé du bien-être animal dans le choix et le développement
des types d’élevages choisis et promus. Il est donc injuste de
critiquer « à la légère » les éleveurs qui doivent néanmoins
intégrer qu’aujourd’hui les consommateurs veulent savoir comment sont produites
les denrées agricoles. Et les transformateurs de l’industrie alimentaire, en
l’occurrence laitière, sont sur le même bateau car la demande est identique en
matière de process de fabrication. Historiquement, les mouvements ayant œuvré à
la quasi-disparition des expériences sur animaux pour développer des produits
cosmétiques, voire pharmaceutiques, furent précurseurs. Puis sont arrivés les
élevages de porcs, puis de volailles … « et vous êtes bien inspirés dans
le secteur laitier à vous mettre dès à présent au travail en la matière »
puisque sont déjà sur la table les pratiques des abattoirs (y compris pour les
vaches laitières), l’écornage, l’entravement, … Le label "Bien-être animal" que
vont mettre en œuvre les Pouvoirs Publics fédéraux (le projet est en période de
notification à Bruxelles et les textes d’application en cours de rédaction)
n’est qu’un instrument, parmi d’autres, pour répondre à la demande sociétale en
matière de bien-être animal. Il comporte 3 niveaux qui sont tous supérieurs au
minimum légal. Les Contrôleurs du Dispositif seront eux-mêmes contrôlés par un
Service du Ministère fédéral qui sera créé à cet effet. Le dispositif sera
volontaire et non pas obligatoire, UE oblige entre autres...
- Thomas Schröder (Président du Deutscher
Tierschutzbund)
Cette
puissante ONG (Confédération de Fédérations et d’Associations
environnementalistes et de protection animale) - il se dit que c’est la plus
grosse ONG d’Allemagne - constate qu’effectivement, là où se construisent de
nouvelles étables, les choses vont mieux en matière de bien-être animal. Pour
son Président pas question « d’autrefois tout était mieux » ni de
« petit c’est bien, grand c’est pas bien ». Ceci étant, pour
l’obtention du label est quand même prévue une taille maximale (350 vaches
semble-t-il) mais qui n’a rien à voir avec le bien-être animal, mais exigée par
la composante environnementaliste de la Confédération (Bund).
Pour
ne pas se fourvoyer et être crédible il faut être capable d’exprimer une vision
à 10 ou 20 ans. Le Bund est défavorable au caractère volontaire et donc
non-obligatoire de ce que vont mettre en place les Pouvoirs Publics en la
matière. Il se réjouit par contre de l’ITW (Initiative Tierwohl) pour un label
commun aux grands de la Distribution à compter du 1er avril prochain
pour arrêter la cacophonie qui menace… mais demande aux Enseignes d’arrêter de
faire, en même temps, des promotions de produits carnés à vil prix. Sa
conclusion : « attention, le consommateur n’est pas là pour compenser
avec son porte-monnaie l’inorganisation des filières ».
- Christoph Bossmann (DG de la Laiterie
Osterhusumer Meierei…
laiterie qui a sauté le pas et appose le label du Bund sur son lait de
pâturage!
L’essentiel de ses débouchés est sur le marché en décroissance du
lait de consommation et il est impératif pour elle de se diversifier en
commercialisant des produits « qui racontent une histoire ». 25 de
ses producteurs se sont engagés dans cette voie et ont, pour ce faire, chacun
investi entre 100.000 et 250.000€ sur leur exploitation. Présentement leur prix
du lait est supérieur de 4 cents à celui des autres producteurs. Au passage le
DG d’Osterhusumer Meierei a critiqué le coût trop important du dispositif… et, ô surprise, indiqué qu’il se vend plus de ce lait-là dans le Sud de l’Allemagne
(loin de la laiterie !) que dans le Nord de l’Allemagne (aux portes de la
laiterie !). La laiterie gère une liste d’attente des producteurs qui
souhaitent rejoindre le dispositif mais conditionne leur admission au développement
de ses débouchés…
- Jan Heusmann (Producteur de lait du Land
Niedersachsen et Président de l’Association laitière de celui-ci)
Jan Heusmann constate que les producteurs se sont résolument engagés dans le cadre de cette
problématique. Il en veut pour preuve qu’après avoir introduit des paramètres
de santé animale dans le suivi des « turbo-vaches » on constate,
depuis le début des années 2000, que l’augmentation du rendement par vache
n’est plus corélé à une diminution de son bien-être.
Au
cours de la discussion il a été rappelé que dans une intéressante Etude de
l’Université de Göttingen datant d’il y a une dizaine d’années deux stratégies
étaient apparues possibles pour augmenter le bien-être animal : soit on
prend comme point de départ un niveau très supérieur au minimum légal et on
procède par développements successifs de niches, soit on part plus ou moins du minimum
légal pour ratisser large dès le départ. Julia Klöckner est réputée avoir
choisi cette seconde option, bien que le DBV lui demande déjà de baisser encore
les exigences du niveau de départ !
Il a
également été rappelé qu’il reste difficile de mesurer le bien-être animal du
fait de la quasi-absence d’indicateurs en provenance directe des animaux… ce
qui conduit à se concentrer, entre autres, sur l’environnement de l’animal. Il
est un peu désespérant que l’on mette tant de temps à élaborer un vocabulaire
commun qui permettent aux éleveurs-laiteries-distributeurs-consommateurs de
s’assurer qu’ils parlent bien de la même chose.
Dans
une vigoureuse intervention le Président des Producteurs de lait de Bavière a
estimé que les ONG du secteur ne sont pas vraiment intéressées par des
solutions qui peuvent être réellement mises en œuvre, leur objectif « in
fine » étant la disparition complète des animaux d’élevage. Intervention
très critiquée par le Président du Bund qui espère que les milieux agricoles
considèrent que c’est une chance pour eux qu’on veuille faire évoluer le monde
avec eux et non pas contre eux.
De
la Conférence de Presse MIV qui a suivi, nous avons pour l’essentiel retenu des
réponses des Dirigeants du MIV aux questions des journalistes que :
· Brexit non inclus, l’année laitière 2019 débute sous de meilleurs auspices
que ne l’avait fait 2018 qui s’est soldée par une collecte de 32.4 millions T. Le
prix moyen à la production servi l’an passé fut de 34.5 cents (supérieur à la
moyenne des dix dernières années, mais inférieur à celui de 2017 qui fut de
36.2 cents).
· Le MIV étudie depuis des années avec l’Institut Thünen de Braunschweig
et le concours actif de 34 laiteries la problématique durabilité, thème qui
inclut le bien-être animal. Et là deux options sont possibles : soit on
établit un standard de base de niveau élevé avec pour but de faire progresser
tout le monde par capillarité, soit on établit un standard de base de faible
niveau afin d’embarquer un maximum de la production dès le départ. L’Etude en question bénéficie du concours
financier des Pouvoirs Publics fédéraux (BLE).
· Si ce n’était pas le cas « auparavant », à présent les laiteries
sont, « que cela leur plaise ou non » intégrées par l’opinion
publique à la problématique bien-être animal : il est donc fondamental
pour elles « d’être en chemin » également sur ce thème.
· « Les choses avancent doucement » sur le chantier
« Stratégie Lait 2030 » initié ici il y a un an par Ingo Müller, le
DG de DMK. Le Conseil du MIV s’en est saisi lors de sa réunion de février 2018
à Bruxelles, un Groupe de Travail a proposé un texte au Conseil de juillet 2018
qui l’a adopté. Il a ensuite été avalisé à l’unanimité par l’AG MIV d’octobre
dernier. Depuis, le DBV, le DRV et, plus récemment, le BDM en ont fait de même.
A ce stade ces documents (qui n’ont pas d’architecture commune et des thèmes
spécifiques à chacun d’entre eux à côté de quelques autres communs à tous) sont
dans l’attente d’un synopsis qui présente « les points d’accord et les
points où les positions sont actuellement différenciées », dont
l’élaboration a été l’objet d’une première réunion DBV-MIV la semaine passée à
la veille de l’ouverture de la Semaine Verte. Pour l’instant les uns estiment
nécessaire de recourir à un(des) Consultant(s) et (ou à) un Facilitateur dans le
cadre des travaux à venir, les autres non… L’objectif est d’essayer de
produire un premier document pour l’été 2019. En réponse à une question il a
été confirmé que le MIV ne souhaite pas la création d’une Interprofession
laitière (Branchenorganisation). NDLR :
dans certains des Länder qui constituent la République fédérale, mais pas dans
tous, une « cvo laitière » est prélevée (en Bavière il s’agit à
présent d’une cotisation) et dans deux de ces Länder elle finance des « Landesvereinigungen
der Milchwirtschaft » où travaillent ensemble producteurs et
transformateurs, en particulier en matière de promotion, communication et
relations publiques.
Nathaleen
Hewitt & Philippe Jachnik
22.01.2019